La situation sécuritaire dans l’Est de la République Démocratique du Congo suscite une vive inquiétude parmi les journalistes exerçant dans cette région en proie à des conflits armés. L’accès restreint aux sources d’information, couplé à la peur des représailles de divers acteurs, complique considérablement leur travail quotidien.
Ce constat alarmant concernant les conditions de travail dans un environnement hostile a été au centre d’un webinaire organisé par le Forum Pamela Howard de l’International Center for Journalists (ICFJ), axé sur le reportage en temps de crise mondiale, le jeudi 27 février 2025.
Depuis la résurgence de la rébellion du M23 dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, la profession journalistique se trouve dans une situation précaire. La quête de la vérité se heurte à des conditions de travail de plus en plus difficiles, aggravées par l’instabilité sécuritaire. Sammy Mupfuni, directeur général de Congo Check, témoigne : « La situation est compliquée pour les journalistes. Certains ont été contraints de fuir la ville. La sécurité est difficile à garantir des deux côtés. La désinformation s’étend, et l’accès aux sources d’information est problématique. »
À Goma, comme dans d’autres régions de l’Est de la RDC, le regard des autorités et des groupes armés sur les journalistes est particulièrement vigilant, en raison de leur responsabilité sociale. Ces professionnels des médias jouent un rôle essentiel dans l’information de leur communauté, tout en respectant les principes d’impartialité et de neutralité. Édouard Samboe, journaliste et fondateur du média Laabali, souligne : « Les journalistes sont surveillés de près. Cette surveillance entraîne des morts et des disparitions. Il est crucial que le journaliste fasse comprendre à la population, aux groupes armés et au gouvernement qu’il n’est l’ami ni l’ennemi de l’une ou l’autre partie. »
Veiller au droit à l’information
En période de crise sécuritaire, les journalistes se positionnent comme des garants de l’accès à une information fiable. Sadibou Marong, responsable du Bureau Afrique subsaharienne de Reporters sans Frontières, encourage les journalistes à porter une attention particulière à leur sécurité, tant physique que numérique.
« Les enjeux liés au contrôle de l’information, à la manipulation et à la désinformation sont majeurs. Les journalistes doivent préserver le droit à l’information tout au long de leur mission. Ils ne doivent pas devenir des porte-voix pour les uns ou les autres », conseille-t-il.
Pour sa part, Sammy Mupfuni envisage de se prémunir contre les dangers en évitant de couvrir les activités des belligérants et en pratiquant l’autocensure. « Il est essentiel de rester factuel et d’éviter de prendre parti dans le conflit. Garder son bon sens est primordial. »
Édouard Samboe insiste également sur le fait que, dans un contexte de conflit, il ne s’agit pas seulement des protagonistes, mais aussi des nombreuses victimes touchées par ces affrontements. Il souligne l’importance de traiter des sujets diversifiés pour épargner les journalistes des menaces des groupes armés. « Nous ne sommes pas dans un environnement de précipitation, mais de lucidité. Il faut mettre en œuvre des protocoles de sécurité. La protection des journalistes est un devoir des belligérants. Être journaliste, c’est d’abord être en vie », conclut-il.
La rédaction