Le discours du Président Félix Tshisekedi sur l’état de la Nation, prononcé le 8 décembre 2025 devant le Parlement réuni en Congrès, a été scruté à la loupe dans l’Est de la RDC. Si l’accent mis sur les récents Accords de Washington avec le Rwanda a suscité un espoir prudent à Kinshasa, il a rencontré une exigence d’effectivité de la part des représentants des populations martyrisées.
Le Député National élu du territoire de Beni, Baliesima Kadukima Albert, a résumé le sentiment général des communautés du Nord-Kivu et de l’Ituri : « L’Est a besoin de vivre dans la paix. »
L’allocution présidentielle est intervenue juste après la signature des accords de paix visant la pacification de l’Est et l’arrêt de l’exploitation des « minerais de sang ». Cependant, comme le rapportent les médias locaux, la réalité est celle de « poursuites de violents combats » et d’une dégradation sécuritaire qui contraste brutalement avec l’optimisme diplomatique affiché.
La voix du Député Baliesima fait écho au fossé persistant entre les engagements politiques et le calvaire quotidien des civils :
- L’Échec de l’État de Siège : Près de cinq ans après son instauration, cette mesure exceptionnelle dans l’Ituri et le Nord-Kivu n’a pas réussi à neutraliser durablement les groupes armés (M23, CODECO, ADF). L’élu de Beni rappelle que les promesses d’amélioration sécuritaire faites lors des discours précédents ont produits des effets palpables mais beaucoup reste à faire sur sur le plan sécuritaire, ce qui fait quelque part un peu de méfiance de la part de la population.
- Accusations et Accords Fragiles : Les récentes révélations des experts de l’ONU, qui accusent l’armée rwandaise et l’AFC-M23 d’exactions ciblées et d’exécutions sommaires, compliquent l’application de l’accord de Washington. Pour Baliesima Kadukima, l’engagement formel doit être immédiatement suivi d’un retrait vérifiable et de l’arrêt des exactions, sans quoi l’accord sera perçu comme une simple manœuvre politique.
Pour l’élu de Beni, l’effectivité des promesses du Chef de l’État doit se manifester sur trois fronts majeurs :
- Sécurité Concrète : Mise en place d’un mécanisme de suivi parlementaire et communautaire des Accords de Washington, garantissant l’application du cessez-le-feu et le démantèlement des groupes armés sans délai.
- Justice et Humanitaire : Une réponse ferme et rapide à la crise humanitaire, avec des solutions concrètes pour le retour sécurisé des déplacés, la prise en charge des traumatismes (particulièrement des jeunes) et la fin de l’impunité pour les crimes documentés.
- Développement Local : Traduire le partenariat économique stratégique avec les États-Unis par des investissements directs et des projets d’infrastructure qui génèrent de l’emploi pour les jeunes de l’Est, offrant une alternative concrète aux réseaux d’exploitation illégale des ressources.
Le discours du 8 décembre a réaffirmé la volonté du Président Tshisekedi de « tenir la barre ». Cependant, la pression des élus comme Baliesima Kadukima Albert et l’angoisse des populations de l’Est exigent désormais que cette volonté se matérialise par la seule chose qui compte : une paix tangible et durable sur le terrain.
Gloiredo Ngise